Critique d'"une semaine".

Publié le par PEG

Critique d"une semaine".

 

L'historien, contrairement à ses homologues sociologues, ou anthropologues, est rarement au contact de ses sujets de recherche. En se prêtant soi-même à l'analyse de terrain on peut pourtant comprendre l'utilité de celle-ci.

C'est certainement ce qui m'a poussé (plus la volonté d'obtenir quelques contacts de plus pour mon mémoire) à m'embarquer dans cette galère. Encore embrumé par la lecture de la enième biographie de Michel Rocard, je me suis trouvé recruté par un très sympathique jeune homme pour faire parti des spectateurs de semaine critique. Qui l'eut cru. Ce n'est finalement pas si compliqué de passer à la télé. Passer à la télé, c'est en effet le bon et le seul vrai mot pour cette opération. Dès qu'une caméra se tourne vers le public tout le monde se redresse se met à sourire. Voilà finalement le seul but de la vie: passer à la télé. Pour le meilleur et pour le pire.

Mais n'est pas télégénique qui veut!

Il faut d'abord subir un vrai casting. En effet, si vous avez cru atteindre la notoriété en voyant le sergent recruteur vous supplier de venir, détrompez-vous.

Le sergent chef, une fois l'heure venu d'être sous les ordres se transforme en bagagiste et laisse la place au terrible commandant (quel féroce commandant aux jupons très courts et aux talons trop hauts). Il faut en effet se soumettre aux quotas... Et aux gouts personnels du chef!

En effet sur quels critères se fondent le garde chiourme aux injonctions si douces, exceptés ceux que lui dictent son propre sens de la télégénie (qui n'est visiblement pas le même que le mien).

Mais non ni voyez pas là la colère d'un recalé (je vous l'ai dit je n'étais pas là pour passer à la télé!), mais l' impression de l'historien devant se spectacle, ma foi fort amusant. Un vrai cluedo!

Là le monsieur avec la cravate, ici la jeune fille avec le foulard, là le monsieur asiatique, ah puis non le monsieur avec la cravate il y a trop de couleurs sur celle-ci, nous allons vous préférer le monsieur là avec les lunettes, ça fera intelligent.

Après ce jeu de massacre (de près d'une heure) arrive les bêtes.

Et nous (les recalés) devons jouer le role du public dans les arènes. Trop attentifs à ce qui se dit, on nous le rappelle très rapidement. Vous êtes trop mous, réagissez!

Alors on se met aux aguets, on ne réfléchit plus, on crie, puis on exulte, et enfin on pleure (oui il y a aussi des quotas pour les sentiments). Mais cela ne suffit pas, on nous rappelle à l'ordre. Alors on crie encore plus fort, on insulte la méchante khadafiste, on hue le nom de Sarkozy et surtout... On applaudit Stéphane Bern (il est si sympa). La parole est à celui qui parle le plus fort. Le débat, lui, reste incipide et plat. 

Et vient l'heure tant attendue. Il est là, tapis dans l'ombre, jouant son propre role en draguant outrageusement sa voisine. Oui le voilà, le seul, le vrai Nicolas Bedos. Le public hurle de bonheur, tout le monde va en avoir pour son grade, on met enfin à mort la bête.

De suite, les blagues fusent toutes plus ignobles les unes que les autres. Aucune limite, surtout pas, l'audience commence à peine à monter.

Et puis le calme revient. Le public repus de ce gouteu^x spectacle s'en va heureux, remerciant le staff qui une heure plutot lui avait préféré le monsieur avec la cravate.

Il veut maintenant toucher, voir si tout cela était bien vrai. Et oh magie, ils sont en chair et en os, ils sont même susceptibles et pire encore, grincheux.

Ah décidément la télé, c'est bien mieux à la télé.

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